Les Enfants Jésus de cire

3 décembre 2018

Chez les catholiques pratiquants, à l’approche du temps des Fêtes, il est d’usage d’exposer une crèche au pied du sapin de Noël. Par le passé, selon les souvenirs des augustines, chaque département de l’Hôtel-Dieu de Québec avait l’habitude de se parer d’une crèche de Noël avec un petit Jésus de cire, confectionné au monastère. Pour la religieuse, la fabrication de l’Enfant Jésus de cire aux joues rouges et au visage poupin revêt un caractère spirituel important.

Une figurine du XVIIe siècle

Ce sont les communautés religieuses féminines (les Augustines et les Ursulines) qui vont acheminer les premiers Jésus de cire en Nouvelle-France, où la dévotion pour l’Enfant Jésus est déjà bien ancrée, notamment chez les Jésuites et plus tard les Sulpiciens. Le plus ancien Jésus de cire du Monastère des Augustines est exposé au Musée. Cette pièce, qui daterait du XVIIe siècle, serait un don de celles que les religieuses appellent leurs « Mères de France » : les Augustines de Dieppe. Ce présent, conçu en France, probablement au monastère fondateur de Dieppe, se voulait certainement un acte de réconfort de la part des augustines françaises en prévision du premier Noël de leurs consœurs passé en Nouvelle-France; une célébration qu’elles ont passée à la maison de la Compagnie des Cent-Associés.

© Collections du Monastère des Augustines, Hôtel-Dieu de Québec

Une tradition

Aujourd’hui, on trouve environ 75 Jésus de cire dans la réserve muséale du Monastère des Augustines, sans compter certaines figurines conservées par les communautés pour leur propre usage. Dès les débuts de la colonie, les Augustines se sont spécialisées dans la fabrication d’Enfants Jésus de cire, un savoir-faire transmis de génération en génération. Dans la réserve muséale, on trouve également des outils servant à leur fabrication : des moules en plâtre, des yeux de verre, des cheveux naturels qui étaient préalablement frisés à la main à l’aide d’une aiguille à tricoter. Pour en savoir plus sur leur confection, je vous invite à lire l’article « Les Enfants Jésus de cire : une tradition des Augustines depuis 1639 », sur le site Internet de la Fiducie du patrimoine culturel des Augustines.

Un acte de dévotion

Pour la « sainte artisane », pour reprendre l’expression de l’ethnologue Marius Barbeau, la confection d’un Enfant Jésus de cire est plus qu’un loisir, c’est un acte de dévotion qu’il faut accomplir avec soin. L’œuvre doit parfaitement être à l’image du Christ.

Aujourd’hui, Sœur Hélène Marquis, supérieure du monastère Saint-Augustin, confectionne encore quelques Jésus de cire chaque année. Seule membre de sa communauté encore porteuse de cette tradition, elle s’assure de la perfection de chaque détail de la figurine. L’acte de fabriquer un Jésus en cire n’est pas anodin; en fabriquant les mains du poupin, Sœur Marquis pense au seigneur en s’assurant que « ses mains bénissantes prennent soin de bénir tous les occupants de la maison ». Elle s’assure également que le regard de la statuette soit « pacifiant, doux, communiquant la joie ». Elle confectionne les jambes en pensant aux personnes à mobilité réduite et souhaite faire en sorte « qu’elles soient alertes et porteuses de bien ». À l’image de l’Enfant Jésus qui s’est incarné pour venir sauver le monde, les Jésus de cire communiquent les vertus chrétiennes[1].

Ce jésus de cire est un don de monsieur Kavanagh, père de soeur Saint-Joseph, Eva Kavanagh, au monastère de Gaspé.
© Jésus de cire, 20e siècle, Gaspé, Le Monastère des Augustines (HDG-G1-M1,5/1:380)

 

La Nativité toujours d’actualité

Bien que la tradition de fabriquer des Jésus de cire soit en voie de disparition, faute de relève et de transmission du savoir, son utilisation est toujours d’actualité chez les Augustines. Au monastère de l’Hôtel-Dieu de Québec, une crèche est installée par une religieuse dans la chapelle au tout début de la période de l’Avent (soit le 4e dimanche avant Noël). Seul le personnage de Marie, mère de l’Enfant Jésus, est présent avec une Bible ouverte. Les autres personnages et animaux sont ajoutés au fur et à mesure que les semaines passent. L’Enfant Jésus sera intégré à la crèche le jour de Noël, ainsi que les rois mages à la fête des Rois. Une fois complété, l’ensemble représente la Nativité, l’un des principaux récits fondateurs du christianisme, c’est-à-dire la naissance de Jésus.

Atelier de Jésus de cire
Atelier de travail, 1950
Fonds Monastère des Augustines de l’Hôpital général de Québec
© Archives du Monastère des Augustines

Le temps des Fêtes au Musée

À partir du 11 décembre 2018, les visiteurs se joignant à la visite commentée du Musée auront l’occasion d’en apprendre un peu plus sur le temps des Fêtes chez les Augustines. Les guides ajouteront à leurs visites régulières des éléments se rapportant à Noël et au jour de l’An. Une belle façon de lier culture et festivités!


Sources :

Laurier Lacroix, « Les petits Jésus de cire », Cap-aux-diamants, numéro 32 (hiver 1993), p. 28-31.

Laurier Turgeon (dir.), Le patrimoine religieux du Québec : entre culture et culturel, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2005, 562 p.

Ariane Robitaille, « Les Enfants-Jésus en cire, une tradition des Augustines depuis 1639 », [en ligne : http://www.augustines.ca/fr/actualites/65] (consulté le 24 novembre 2017).

Diane Audy, « La fabrication d’objets en cire chez les Augustines », Site du Patrimoine immatériel religieux du Québec

(consulté le 24 novembre 2017)


[1] D’après un reportage de Jean-Robert Faucher, RDI, 2003.